Show du Zéphir : Discussion avec Luc De Larochellière

Propulsé par un succès instantané à la fin des années 80, le chanteur Luc De Larochellière fait partie des grands auteurs-compositeurs de notre patrimoine culturel québécois. Et puisque ses chansons font du bien, il s’implique régulièrement pour les bonnes causes, comme celle de la santé mentale, et il nous fera l’honneur d’être présent à la 4e édition du Show du Zéphir le 13 novembre prochain. Discussion avec un artiste qui porte un regard lucide sur le monde et qui aime le partager.

Luc, pour toi, qu’est-ce que la santé mentale?

La santé mentale, pour moi, c’est d’être mentalement en contrôle. C’est lorsqu’on est en équilibre au niveau de notre conscience, du monde qui nous entoure et de nos émotions. En fait, c’est un état dans lequel on se sent bien. La notion de bien-être y est pour beaucoup ! Et pour moi, la santé mentale et émotionnelle, ça vient ensemble. Quand tu n’es pas en bonne santé mentale, tu souffres émotionnellement. En tout cas, dans mon cas à moi, c’est ça !

As-tu toi-même déjà souffert d’épisodes de déséquilibre ?
Oh oui ! D’une part, j’ai un problème anxieux avec lequel je dois vivre, que je dois gérer constamment. D’autre part, j’ai eu à faire face à des gros problèmes, j’ai eu des épisodes de dépression assez forts dans ma vie. Et on n’avait à l’époque aucune information, personne ne nous parlait de ça. Si tu étais dépressif, y fallait que tu gardes ça pour toi, il ne fallait surtout pas que le monde le sache, fallait faire comme si… Jusqu’au tournant des années 2000, il ne fallait pas en parler parce que c’était afficher une faiblesse et, afficher une faiblesse, c’était perdre de la place, de la clientèle, perdre des ventes… etc. Je pense qu’on est dans une époque qui est beaucoup mieux qu’avant pour ça. En tout cas, ça dépend pour qui mais, dans mon cercle social à moi, c’est rendu pratiquement banal de parler de faiblesse et de vulnérabilité, et tant mieux!

Selon toi, est-ce que les gens ont encore beaucoup de préjugés, des tabous, face à la santé mentale ?

C’est sûr qu’y a encore des gens qui ont des préjugés par rapport à la santé mentale. Moi ce que je remarque souvent, c’est que la première personne de qui on doit combattre les préjugés par rapport à la santé mentale, c’est nous-mêmes ! J’ai remarqué ça chez moi et chez beaucoup de gens qui avaient des problèmes. Y a presque toujours une période de déni au début, une période de « je vais m’en sortir tout seul, ce n’est pas si grave » ! C’est important de dédramatiser cette notion-là de santé mentale, de maladie mentale, et de déculpabiliser parce qu’il y a beaucoup de culpabilité chez les gens, par rapport à eux-mêmes, leur propre petite voix dans leur propre tête qui leur dit que ce n’est pas bien de se sentir de même, que c’est pas correct d’être de même, que t’es pas bon, etc… Je pense que la première critique à faire taire, c’est la sienne !

Dirais-tu que quand nous-mêmes on ne veut pas voir nos problèmes, ça vient de ce climat de préjugé dans lequel on vit ?

Oui, c’est certain que le regard des autres ça peut être difficile et fragilisant. Tu sais… moi je suis un gars qui porte des lunettes et je peux te dire que j’ai passé des années à marcher sans voir où j’allais parce que je ne voulais pas être un gars avec des lunettes ! Mais, que veux-tu, j’ai besoin de lunettes ! Donc, y a des gens qui ont de la difficulté à accepter qu’ils ont besoin d’aide psychologique, mais que veux-tu, tu es comme un gars ou une fille qui a besoin de porter des lunettes… T’as beau te dire que tu vas y arriver à force de volonté, bien tu vas rentrer dans les murs parce que tu ne vois pas bien ! Et ce n’est pas dû au fait que tu es une méchante personne, une personne paresseuse, etc. Tu sais, la valeur de quelqu’un, c’est ce qu’il fait avec ce qu’il a ! Et parfois quelqu’un qui reconnait, qui prend la mesure, et qui accepte ses limites, souvent ce sont ces gens-là qui en bout de ligne vont finir par être les plus performants, parce qu’ils savent exactement dans quelle mesure ils peuvent travailler. Ils s’écoutent, ils connaissent leurs balises.

Est-ce que, selon toi, une personne en difficulté doit aller chercher de l’aide ?

Oui, définitivement ! Parfois le simple geste d’aller chercher de l’aide, c’est le début de la guérison, le simple fait de s’accorder à soi-même l’importance et la valeur de dire « je vais faire ça pour moi » ! Moi, je vais prendre un rendez-vous avec un spécialiste, un « donneur d’aide » pour ce que j’ai. Je vais prendre ma voiture et je vais y aller. Je vais m’accorder ce temps-là, je vais investir dans mon bien-être. Je pense que ça fait déjà partie de la guérison ! Le fait de poser un geste, c’est déjà un gros bout de l’affaire. D’une manière ou d’une autre, si tu ne vas pas demander de l’aide, tu n’en auras pas ! Ça ne viendra pas tout seul ! C’est comme mon exemple des lunettes de tantôt. Si t’as besoin de quelque chose, y faut que tu y ailles… Donc, oui, on doit aller demander de l’aide, quand on souffre, peu importe le degré. Pourquoi souffrir plus longtemps ? Quand il existe de l’aide pour te faire sortir de ton état plus rapidement.

Quel conseil donnerais-tu à quelqu’un qui a des difficultés et qui les vit seul, qui vit de l’isolement, de la solitude?

Tu sais, la résilience, c’est trouver un petit bout, s’accrocher après, et tranquillement se remettre debout, se hisser. Donc voilà, trouve le petit bout, commence par là, et relève-toi! Bref, fais le premier pas…

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