Il y a quelques semaines, sans crier gare, Mathilde Gagnon arrive dans nos bureaux. Ses premiers mots ouvrent grand la porte à une longue discussion : « Je vais publier bientôt un livre qui parle des difficultés mentales et physiques que la vie a apportées dans mon parcours. J’aimerais vous en parler avant la parution de mon livre dans les premiers mois de 2025. »
Dès le début de la conversation, la jeune femme de 22 ans parle des problèmes de santé mentale qui l’ont conduite à poser des gestes malheureux comme, par exemple, une tentative de suicide. C’est donc l’écriture et la volonté d’en parler ouvertement qui l’ont aidée et l’aide encore à s’en sortir. « Mon but, c’est de partager ce que j’ai vécu afin d’aider d’autres personnes à s’en sortir. Nous avons à Chibougamau et à travers tout le Québec toutes les solutions pour passer au travers des problèmes de santé mentale. Je veux donc que les différents problèmes que j’ai vécus servent à quelque chose, à quelqu’un qui vit sensiblement les mêmes problèmes que les miens. J’apporte donc des solutions avec Instable qui devrait paraitre selon l’éditeur dans les premiers mois de 2025. »
Survivante d’agression sexuelle
Déjà tout bouleversé par les paroles de Mathilde, elle précise qu’elle a débuté l’écriture d’un deuxième livre qui parlera de son agression sexuelle… alors qu’elle est en cour avec son agresseur. « Mon premier livre a été une certaine délivrance. Je suis maintenant capable de marcher et courir et surtout capable de parler. J’ai donc témoigné, il y a quelques [semaines], au palais de justice de Chibougamau alors que j’ai été victime d’agression sexuelle en 2023. Cette expérience fera l’objet d’un deuxième livre sur lequel je travaille très fort. J’ai été capable de livrer un témoignage « impeccable » comme le dit mon avocate et, définitivement de tout mon cœur, je veux encourager la dénonciation. »
Une aide précieuse
En ce qui regarde cette dénonciation, elle en parle avec beaucoup de conviction et, là encore, souhaite aider les personnes qui vivent des tragédies de ce genre. « J’ai eu beaucoup d’aides et de soutiens psychologiques de la part de différents services et des policiers. Je veux donc que ce deuxième livre serve aussi de guide pour des personnes qui se demandent si elles veulent aussi dénoncer leur agresseur. Si j’ai eu la force de me présenter devant un juge et de parler, c’est parce que je voulais éviter que le drame ne se reproduise avec une autre victime, que mon agresseur mérite un jugement, ainsi que pleins d’autres raisons sont en cause… Il est donc important pour moi d’aider les autres sur ce chemin difficile. Aujourd’hui, je me sens libérée et j’ai été capable de dire ce qui s’est passé lors de mon passage devant le juge. Hâte de voir la suite… »
« Je sais juste que c’est le début de ma fin »
Mathilde Gagnon nous a permis de lire son manuscrit avant la publication. Instable est un récit à la fois tragique et troublant. Elle raconte tout dans les moindres détails comme, par exemple, le choix difficile de la voiture qui aurait dû mettre fin à ses jours en mars 2019 sur le chemin Merrill. Les différents chapitres comportent des dates précises, car elles sont liées à des évènements marquants de la vie de la jeune femme. Ces chapitres nous servent de guide, car les phrases nous conduisent souvent à un long tunnel qui, au fil des pages, est de plus en plus sombre.
« Une flamme vous consume à l’intérieur de la poitrine »
Tout au long des lignes et des mois, le lecteur vit le parcours et les expériences souvent très douloureuses de Mathilde. C’est vrai que le récit peut définitivement servir de réflexion à des personnes avant justement d’en arriver à la même conclusion que celle du mois de mars 2019.
Évidemment, je m’en voudrais de vous dévoiler la fin, mais je sais que vous avez deviné que, si cette jeune femme publie un livre pour aider les autres, c’est que définitivement, elle a trouvé une lumière au bout de son tunnel. « J’ai réussi à avoir mon permis de conduire après avoir échoué trois fois le test pratique. J’ai obtenu mon diplôme d’école secondaire après avoir fait trois fois mon examen de français. Tout n’est que question de perception. Je ne vois pas ces reprises d’examen comme des échecs, mais comme de l’expérience. Je ne vois pas mes tentatives de suicide comme le diable, mais beaucoup plus comme un essai d’avoir la paix. Je me suis trompée sur le moyen de trouver cette dite paix. On la trouve dans la vie. »