La décision est tombée la semaine dernière à la grande déception des amateurs de chasse de la région : il n’y aura pas de chasse sportive dans la zone 17 pour une deuxième année de suite. La sauvegarde du cheptel d’orignaux sur le territoire couvert par la zone 17 est à l’origine de cette décision.
Le député d’Ungava, Denis Lamothe, a annoncé la nouvelle via une publication Facebook. L’an dernier, jusqu’à la dernière minute, les amateurs y avaient cru et c’est seulement la communauté de Waswanipi qui n’avait pas voulu de l’entente. Les cinq communautés cries du territoire doivent être solidaires dans leur décision. Pour plusieurs, le fait que les élus arrivent à une solution pour limiter les dégâts cette année ne semblait qu’une formalité. Au dire du député d’Ungava : « Il n’y a pas eu de retour positif de la part des Cris. »
Le député a rappelé qu’en vertu de la Convention de la Baie-James et du Nord québécois, les Cris ont droit à la récolte garantie de 158 orignaux dans la zone de chasse 17, sous réserve du principe de conservation de la ressource. Or, selon les données d’inventaires pour assurer la pérennité du cheptel, la limite de prises a été fixée à 104 orignaux.
Monsieur Lamothe souligne qu’un comité formé d’élus avait une première rencontre le 27 mars (au moment d’aller sous presse). « Différents sujets seront abordés. On verra ce qui ressortira du comité pour 2024 », dit-il. Pour lui, « la chasse sportive et la pêche pour les Jamésiens, c’est aussi une culture. »
Réaction de Manon Cyr
La mairesse de Chibougamau, Manon Cyr, est loin de nier le problème que l’on vit présentement avec le cheptel d’orignaux sur le territoire couvert par la zone 17, mais elle s’attendait à une décision positive de la part de la nation crie pour ce qui est du partage du nombre de prises.
En séance du conseil municipal de mars, elle s’est dite déçue de la tournure des évènements. « Je crois encore aujourd’hui qu’il est important de vivre ensemble. Je comprends combien c’est important aussi la chasse sportive dans la région pour les Jamésiens. Je suis extrêmement déçue. »
Lors de la période de questions de cette séance municipale, elle s’est interrogée sur certaines pratiques de chasseurs autochtones. « Je vais vous avouer, tout en faisant attention à ce que je dis, nous avons une paix sociale à préserver. Il faut travailler ensemble et appliquer le vivre ensemble. La plupart des chasseurs cris sont respectueux de la nature et du cheptel, mais je vois certains d’entre eux, et je le dis sans généraliser, je suis surprise de voir la manière dont la chasse se fait actuellement. Je comprends la Convention de la Baie-James et que les Cris ont un droit que cette convention leur donne. Mais quand je vois de quelle façon la chasse se fait, ça me laisse un peu perplexe et un peu surprise de voir que certains chasseurs cris ne le font pas dans les règles de l’art. Je comprends qu’ils ont un droit, mais je comprends aussi qu’il faut vivre tout le monde ensemble », a-t-elle affirmé.
Elle croit cependant qu’il est encore possible de trouver des solutions et que, la sauvegarde du cheptel, ce n’est pas seulement l’affaire des chasseurs sportifs, mais bien de l’ensemble des chasseurs du territoire.
Déception pour l’Association chasse et pêche
Le président de l’Association chasse pêche de Chibougamau (ACPC), Stéphane Tremblay, était lui aussi déçu de la décision. Même s’il est encore trop tôt pour avoir la réaction de ses membres, M. Tremblay espère qu’il y aura d’autres négociations. « La grande cheffe des Cris,Mme Gull-Masty, avait mentionné au journal Le Devoir que les négociations pourraient reprendre après les élections provinciales, mais elles n’ont pas encore débuté », a-t-il commenté.
Le président de l’ACPC veut rappeler qu’au-delà de la paix sociale et du vivre ensemble, il ne faut pas négliger non plus l’aspect économique d’une telle décision. « Pour certains commerçants, le fait que la chasse dans la zone 17 soit fermé représente pas moins de 30 % de leurs chiffres d’affaires », dit-il. Sans oublier tous les propriétaires de camps ou de chalets dans la zone qui paient des baux et qui ont investi des sommes considérables pour leurs installations. « Les élus doivent aussi se soucier de l’aspect économique de cette décision. Je l’ai dit à plusieurs reprises, c’est important la paix sociale mais, quand tu perds 30 % de ton chiffre d’affaires, ça aussi, c’est sérieux. Imaginer si d’autres zones de chasse se ferment. »
Monsieur Tremblay a l’intention de lancer une pétition en bonne et due forme pour, par la suite, être envoyée à tous les députés et ministres concernés par cette décision. Il aimerait aussi que la pétition soit parrainée par un élu et déposée à l’Assemblée nationale du Québec. Il invite donc tous ses membres, les chasseurs de gros et petit gibier, principalement les chasseurs de la zone 17, à bien vouloir la signer quand elle sera prête.
Est-ce qu’il y pourrait y avoir des dédommagements pour certains propriétaires qui ont des chalets dans ce secteur? Le député d’Ungava dit avoir entrepris des démarches auprès du cabinet de la ministre responsable des Ressources naturelles, Maïtée Blanchette Vézina. Il s’attend à avoir un retour sur ce sujet prochainement.