Feux de forêt 2023 – Qu’est-ce qui les rend si différents d’un bout à l’autre d’Eeyou Istchee Baie-James?

Les feux agissent de façon si différente du sud au nord du même territoire que même la SOPFEU a dû avouer qu’elle est présentement en apprentissage aux alentours du 53e parallèle. L’enseignement apportera-t-il des changements dans la gestion future des feux de forêt de la zone nordique?

Jérôme Crête, agent de protection à la base de La Tuque pour la Société de protection des forêts contre le feu (SOPFEU), a pu expliquer de vive voix aux résidents de Radisson, mercredi le 2 aout 2023, l’état de situation des feux de forêt qui sévissaient encore, deux mois après leur début, au nord du 52e parallèle. Lors de cette présentation, il n’a pas caché combien la situation des feux identifiés 601 et 602, entre autres, apporte son lot de différences dans le combat contre ceux-ci.

Historiquement, la SOPFEU n’intervient pas sur les feux de forêt dans la zone nordique à moins que ceux-ci ne soient une menace pour la vie humaine ou pour des infrastructures névralgiques. Résultat : les combattants du feu déployés dans cette zone cette année pour protéger les communautés qui s’y trouvent ont fait face à un apprentissage qui les a étonnés. Ils avaient pourtant fait face à des feux de forêt majeurs dans la même région, plus au sud comme à Chibougamau ou Lebel-sur-Quévillon par exemple. Cependant, les combustibles, les vents, l’humidité et les dépressions annoncées dans ce qu’ils appellent la zone intensive du sud n’avaient rien à voir avec ce qu’ils ont découvert plus au nord.

Des différences maintenant connues

Depuis son arrivée sur le territoire nordique le 25 juillet 2023, Jérôme Crête a fait de grands apprentissages. « Dans la zone intensive plus au sud, les arbres poussent plus serrés alors qu’en zone nordique, l’espacement entre les arbres est vraiment plus grand et les arbres beaucoup plus petits. Résultat? La pénétration du vent est plus grande qu’on s’y attendait », mentionne l’agent en feu de forêt. Il ajoute en expliquant que, dans la zone intensive, si le vent annoncé est de 20-25 km, le vent ressenti est d’environ 7 ou 8 km. Au nord, si des vents de 20-25 km sont annoncés, ce sont bel et bien des vents de 20-25 km qui sont ressentis.

« Un feu est beaucoup plus agressif lorsqu’il est exposé au vent réel. » – Jérôme Crête

Étant donné les divergences entre les pluies annoncées et celles qui tombaient réellement dans la zone nordique, la SOPFEU a installé une station météorologique portative entre les deux feux majeurs du secteur. « Cela a permis de faire des corrélations entre le prévu et le réel. Le recensement des données est toujours en cours mais, déjà, nous mettions à la hausse les indices en nous fiant aux 2-3 jours précédents qui n’avaient pas reçu les précipitations prévues », explique-t-il.

Le peu de pluie qui tombait était aussi vite asséché dû aux vents. « C’est le même principe que la corde à linge, plus il y a de vent, plus ça sèche vite » vulgarise celui qui a œuvré à La Tuque et Chibougamau principalement.

« Habituellement, à 60 % d’humidité, la progression des feux diminue ou ralentit. Dans la zone nordique, ça brulait quand même! Ça arrive ailleurs, mais c’est rare », soutient Jérôme Crête.
Classés par intensité de 1 à 6, les feux actuels qui sévissent dans la zone nordique sont classés à 4, soit, des feux de cimes. « On rivalise ici avec deux types de combustibles. » Jérôme Crête nomme la mousse de caribous et les épinettes noires, entre autres. Certains feux qui voyageaient à 10 ou 12 km/heure ont passablement tout brulé sur leur passage; d’autres ont laissé des ilots de verdure. En majorité, les feux de la zone nordique ont brulé beaucoup de territoire en peu de temps.

La SOPFEU laissera-t-elle encore bruler les feux de la zone nordique?

Jérôme Crête n’est pas dans le secret des dieux! Il sait que des feux brulent chaque année dans la zone nordique selon un cycle naturel. Dans la zone intensive plus au sud, la SOPFEU intervient dans l’heure qui suit un début de feu de forêt ou le plus tôt possible. « Le bois est exploitable, commercialement rentable », mentionne-t-il. Il ajoute cependant qu’il a eu échos que des discussions avaient lieu, et ce, depuis l’hiver dernier, à savoir si la SOPFEU pourrait intervenir davantage en zone nordique éventuellement. « Cela implique plus de personnel, plus d’avions, l’ouverture de bases de déploiement. » Jérôme Crête ne connait pas les aspects budgétaires reliés à une telle décision, mais il est logique que l’enjeu financier et logistique teinte les décisions futures de la SOPFEU selon lui.

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