DÉMISSION. Enlisé dans une controverse, le ministre des Transports du Québec, Jacques Daoust, a choisi de quitter la vie politique.
Dans un communiqué laconique publié vendredi en fin d’après-midi, M. Daoust réitère qu’il n’a «rien à se reprocher» et qu’il a toujours dit «la stricte vérité» dans le dossier de la vente controversée de Rona, le géant québécois de la quincaillerie, à des intérêts américains.
«Je n’avais pas été informé de l’intention des administrateurs de vendre la participation d’Investissement Québec dans Rona, je n’ai pas donné d’autorisation à celle-ci et je n’avais pas à le faire en raison des règles en vigueur chez Investissement Québec», a-t-il écrit.
«J’ai toujours dit la vérité, et mes déclarations dans le dossier de la vente des actions de Rona ont été rigoureusement exactes», a-t-il ajouté.
M. Daoust a toutefois décidé de quitter ses fonctions de ministre des Transports, de la Mobilité durable et de l’Électrification des transports et de député de Verdun parce qu’il affirme être devenu une «distraction» qui «porte ombrage» au gouvernement.
L’ex-ministre de l’Économie était dans l’eau chaude depuis des mois, quant à son rôle présumé dans l’autorisation de la vente, par Investissement Québec, de 11 millions d’actions de Rona au géant américain Lowe’s.
La pression sur M. Daoust et sur le premier ministre avait monté d’un cran à la suite de nouvelles révélations indiquant qu’un courriel faisait la démonstration que l’ex-directeur de cabinet de M. Daoust, Pierre Ouellet, avait autorisé la vente de 11 millions d’actions de Rona à Lowe’s.
Le premier ministre Philippe Couillard a salué la contribution de son ancien ministre. «Je tiens à remercier monsieur Daoust pour avoir servi l’État avec conviction dans les dix dernières années, à titre de député et ministre du gouvernement ainsi que de président-directeur général d’Investissement Québec», a déclaré M. Couillard dans un communiqué transmis en fin d’après-midi.
Questionné plus tôt sur le dossier de Rona, le premier ministre avait montré de l’impatience face à son ministre, affirmant qu’il s’attendait à recevoir des réponses «sérieuses» et «rapides» face à ces allégations.
«Des questions sérieuses sont déposées. Elles sont importantes pour moi et elles devront avoir des réponses très rapidement», avait-il martelé, sans témoigner clairement sa confiance envers son ministre.
Le bureau du premier ministre a d’ailleurs annoncé qu’il procèderait à des «ajustements à la composition du conseil des ministres», samedi matin, à 10h.
L’opposition reste sur sa faim
Les partis de l’opposition ne se sont pas dits satisfaits par la démission de Jacques Daoust. La porte-parole du Parti québécois (PQ) en matière de transports, Martine Ouellet, a réclamé une commission parlementaire sur la vente de Rona, où le chef de cabinet de M. Couillard, Jean-Louis Dufresne, et son secrétaire exécutif, Roberto Iglesias, seraient entendus.
«La démission de Jacques Daoust est insuffisante (…) Si Jacques Daoust dit vrai et qu’il n’a jamais été mis au courant de la vente en catimini de Rona, à qui Pierre Ouellet a demandé l’autorisation?», a lancé Mme Ouellet.
Le député de la Coalition avenir Québec (CAQ) François Bonnardel estime lui aussi que «le problème reste entier», malgré le départ de Jacques Daoust.
«On ne sait toujours pas (ce qui s’est passé) et je ne peux toujours pas croire que par un simple « OK », on a vendu un bloc d’actions pour 144 millions de dollars», a indiqué M. Bonnardel, qui souhaiterait lui aussi la tenue d’une commission parlementaire sur le sujet.
La députée Manon Massé, de Québec solidaire, a réclamé également une commission parlementaire pour entendre les témoignages de Pierre Ouellet et de Jean-Louis Dufresne. Elle a aussi demandé à ce que toutes les communications entre M. Ouellet et le bureau du premier ministre soient rendues publiques.
«Je crois que M. Couillard en sait déjà plus qu’il ne le dit. Il ne bernera personne s’il tente de faire de Jacques Daoust le seul bouc émissaire», a affirmé Mme Massé dans une déclaration écrite.
Qui est Jacques Daoust?
-Ministre de l’Économie, de l’Innovation et des Exportations de 2014 à 2016;
-Élu député du Parti libéral du Québec en avril 2014;
-Président et chef de la direction d’Investissement Québec de 2006 à 2013;
-Professeur invité à HEC Montréal en 2006;
-De 1986 à 2005, il a occupé plusieurs postes de direction au sein de la Banque Laurentienne et de la Banque Nationale.
La Presse Canadienne