Lebel-sur-Quévillon – Un retour frappé par l’incertitude

Un groupe de pompiers portugais et américains au travail.

À peine retournés chez eux, les citoyens de Lebel doivent composer avec l’idée d’avoir à faire leurs valises de nouveau, la température annoncée favorisant la croissance des feux.

« On sait que nous sommes encore dans une période sèche », rappelle Alain Lajeunesse, un chef d’opérations à la SOPFEU agissant à titre d’officier à la liaison avec l’équipe de pompiers forestiers américains. « Il n’y a pas eu d’événement significatif de pluie dans les derniers jours. Maintenant, l’humidité relative est un peu plus haute qu’elle l’était et les températures plus basses. Les vents sont faibles. Mais quand on regarde les prochains jours, ça peut changer. C’est une bonne chose pour les gens de revenir à la maison mais on n’est pas à l’abri d’un potentiel de feu pour les prochains jours. Les gens doivent rester alerte dans l’idée qu’ils doivent ressortir de la ville. »

Risques au Nord

Le risque est extrême dans le Nord-du-Québec, au Saguenay-Lac St-Jean, en Abitibi et sur la Côte-Nord, rapporte l’agente à la prévention et aux communications de la SOPFEU, Josée Poitras. « On n’annonce pas de pluie significative avant vendredi tard en soirée, affirme-t-elle. Il y a des feux qui vont reprendre de la vigueur, comme certains qui avaient été contenus. Il y a de l’assèchement et les nuits sont chaudes. Quand elles sont fraîches, ça nous aide à baisser le comportement du feu. »

Les dangers du 314

La semaine passée, on annonçait que cinq feux avaient fusionné, dont le 344, qui menaçait la ville. « Ça va sans doute être plus facile de les combattre, lance le commandant d’intervention sur l’équipe de gestion des feux majeurs provenant des États-Unis, Carl Schwope. Mais la chose à garder à l’esprit est qu’on ne sera probablement pas capable de contrôler tous les feux, il y en a trop. Alors on contrôle des portions qui menacent les valeurs, comme la ville. » M. Lajeunesse souligne qu’il est primordial de surveiller aussi la route d’accès 113.

Dimanche le 18 juin, le feu 344 était à cinq kilomètres de Lebel-sur-Quévillon. « Mais le feu 314 est peut-être une plus grosse menace, commente M. Schwope. Il n’est pas plus gros que le 344 mais il est au nord-ouest et les vents dominants viennent du nord-ouest, alors ça s’en vient vers ici, tandis que le 344 pourrait s’éloigner de la ville. »

Avec des ressources restreintes, les pompiers forestiers n’ont pas eu l’occasion de protéger ou de même vérifier l’état des camps forestiers ou miniers comme celui de Windfall.

Une collaboration louangée

Si c’est l’équipe américaine qui dirige la gestion de feu à Lebel-sur-Quévillon, M. Schwope souligne la collaboration primordiale avec ses homologues. « On ne pourrait pas faire ça sans l’équipe canadienne de support, dit l’homme originaire du Texas. Le système qu’ils ont mis en place pour opérer est vraiment bon. […] Ils nous donnent de très bonnes directions, de très bons objectifs et des priorités, ce qui rend les choses plus faciles pour nous. C’est la même chose avec les Portugais, ils sont vraiment bons. Ils s’intègrent bien au système. »

Le maire de Lebel, Guy Lafrenière, est enthousiaste à propos du travail des pompiers américains. « Quand ils sont partis travailler le premier matin, ils chantaient. C’était le fun à voir. »
Les pompiers américains occupent la salle de curling, l’aréna et divers locaux. Le maire demande à la population de prendre rendez-vous avant de se rendre au centre communautaire ou à l’hôtel de ville.

Des amendes salées

En conférence le 19 juin à 11h, M. Lafrenière a réitéré que la population doit être prête à repartir, même si les feux progressent peu et que le vent est faible.
« L’indice d’inflammabilité va augmenter de jour en jour », note-t-il.

Il est interdit d’aller en forêt, les feux à ciel ouvert et les feux d’artifice sont passibles d’une amende de de 1 000 $ plus les frais d’administration.
La 113 est ouverte mais M. Lafrenière demande à la population de l’utiliser avec modération. Il rappelle aux citoyens que le dédommagement de 1 500 $ fourni par le gouvernement est un montant forfaitaire et non un perdiem. « Mais on fait de la représentation pour de l’aide supplémentaire parce que l’évacuation a duré 17 jours », précise le maire.

Un retour ordonné

Les deux tiers de la population sont revenus, sans désordre et sans problème, selon le maire. « Ça suit les consignes, les gens ont leurs papiers prêts [pour les identifications aux barrages], ça circule normalement, énonce-t-il. Les gens sont heureux et nous disent merci pour la façon dont on a géré ça. »

Certains se plaignent d’être partis pour rien puisque la ville est intacte. « C’est facile à dire 17 jours après, rétorque le maire. J’ai passé la première nuit dans mon camion à regarder le feu brûler et je me suis demandé si on allait y passer. Tu ne peux pas garder 2000 citoyens dans cette situation alors je ne regrette pas ma décision. »

Heureux mais prêts

Même dans l’incertitude, les Quévillonais croisés dimanche à Lebel étaient heureux d’être de retour. Carolane Jalbert raconte qu’elle a été hébergée avec sept membres de sa famille, ses chiens et un chat par un homme de Senneterre qu’elle ne connaissait pas. « On a été très chanceux, ça nous a permis de rester tout le monde ensemble », commente Mme Jalbert. Celle qui devait partir en camping le 28 juin se tient prête à devancer son départ.

Juin a été plus triste pour Martin Pelletier, un aidant naturel qui prend soin de sa mère et son frère, qui souffre de troubles cognitifs, et qui a été transféré de Lebel à Chibougamau puis à Montréal. « Il m’a demandé où il était, raconte M. Pelletier. Ils voulaient le retourner à Chibougamau. Mais j’ai dit non, il va revenir à Lebel. »
« Les gens viennent me voir et veulent des quantités supérieures de médicamentes pour être prêts », rapporte la pharmacienne Olga Domkem.

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